avoir 20 ans au Caire

Sunday, February 26, 2006

apocalypse


depuis deux jours au caire, règne une atmosphère particulière. de ma chambre je ne peux voir le nil tant le brouillard est épais. la ville est cachée par une dense fumée. parfois grise, parfois ocre, certains l'expliquent par ce vent du désert, le khamsin. le soleil ressemble à la lune, et lui aussi a décidé de porter un voile. tout présente une visage différent, les immeubles, les voitures, les arbres sont recouverts d'une couche de poussière que même les quelques gouttes de pluie de ce matin n'ont réussi à effacer. les cairotes continuent leur agitation, à tâtons, sans voir où ils vont.
dans mes pires cauchemards, je m'imagine la fin du monde de la sorte, un brouillard dense cache l'univers et tente d'étouffer la vie. encore une fois, le caire résiste, et demain sera un nouveau jour...

Monday, February 20, 2006

Welcome to Egypt!

"L'Egypte est un grand pays" nous prévient papa à chaque pas. Il est interrompu par un énième "Welcome to Egypt!" d'un attrape-touriste qui cherche à 1- regarder les jambes de la belle occidentale qui nous accompagne; 2- nous fourguer à prix d'or une horreur artisanale ou une pierre précieuse protégée; 3- restaurer l'honneur de la Nation Arabe qui, jusque là inexistante, saigne le Blanc venu salir sa terre. Papa clôt donc bien souvent son fidèle adage par un "mais les Egyptiens ne le méritent pas".

Il est vrai que les contradictions ne manquent pas de nous frapper quotidiennement. Qu'en retirerons-nous à notre retour en France? Sans doute qu'elle forment la richesse du pays. Les taxis râleurs, les marchands roublards, les guides pirates, les conducteurs de bus inconscients ne nous feront pas oublier la majesté de la rive saoudienne omniprésente depuis la station balnéaire hippie de Dahab:

La vue du Caire depuis la minaret de la stupéfiante mosquée Al-Azhar:



Le bonheur de frôler les éngymatiques pyramides de Guizeh:



Le poids de l'histoire en gravissant les sentiers rocailleux du Mont-Sïnaï:



On se dit que finalement ces moments uniques n'appartiennent qu'à ceux qui savent les apprécier.

Les "tracasseries" évoquées par les guides touristiques, le problème de l'impossible séparation de l'Islam et de l'Etat, celui aussi de la tentation radicale constituent également l'arrière plan d'un tableau de l'Egypte qui se voudrait fidèle. Nos mondes vivent sans se croiser et ne semblent voués qu'à s'entrechoquer. Nagla, courageuse, s'épuise à rétablir la justice autour de ceux qu'elles côtoient. Mais elle fait face à la naissance d'un nouvel égyptien toutes les 25 secondes, soit 1 million tous les dix mois. Sa tâche est immense, elle s'y emploie avec le bonheur qu'on lui connaît et l'énergie que l'on admire.

Tant et tant d'images, de rencontres, de petites épreuves, de souvenirs personnels ou partagés tous les quatre marqueront ce séjour, le premier en famille monoparentales. Le premier également depuis que nous sommes "grands".

L'Egype reste sans doute la patrie qui nous évoque un imaginaire le plus vaste et le plus partagé.

Nous sommes passés au musée du Caire, sous les coupoles de la mosquée Mohamed Ali, sur les traces de Naguib Mahfouz, parmi les poissons de la Mer Rouge, au club "Grec" de l'intelligensia égyptienne, à l'After Eight, boîte de nuit connue jusqu'en Israël et où chacun se lève pour saluer l'arrivée de notre clubbeuse internationale.

Nous sommes restés ébahis devant la grâce des soufis derviches tourneurs, reposés en felouk le long du Nil, inquiétés et amusés d'un voyage de huit heures en mini-bus "comme les bédouins" (19 passagers, 14 places!), insurgés contre le boycott des produits danois, mais toujours ravis de rentrer chez Najla, dans son incroyable appartement.

L'Egypte... est un grand pays...

mais...

merci Nagla!

Papa, Tanios et Pablo

Sunday, February 12, 2006

championne

après mon après-midi passé à l'institut de beauté, la télé allumée sur la chîne qui diffuse le stade, Madame Faten déconcentrée pendant la manucure et le coiffeur une oeil sur ma tête et l'autre collé à l'écran de la télé, rendez-vous au Huriyya hier soir pour assister à la finale de la CAN autour d'une bière et d'amis. des egyptiens stressés nous entourent, et les cris sont plus forts au fur et à mesure que s'écoule le temps.
le match se termine, et les prolongations, et l' egypte gagne, championne de la Coupe d'Afrique des Nations. les hommes s'embrassent, chantent, sourient, les drapeux s'agitent. les "au revoir côte d'ivoire" s'élèvent. et puis sur Midane et Tahrir, des voitures klaxonnent plus encore que d'habitudes, les têtes maquillés crient leur joie, d'autres plus malins profitent de l'occasion pour demander le numéro des pauvres petites occidentales venus assister au spectacle. nous quittons les feux d'artifice de la grande place pour nous réfugier dans un café en plein air, entre deux rues et à "l'ombre" des arbres. là, la même effervescence règne, et la patron nous invite à revenir le lendemain pour fêter la victoire. va-t-il payer une tournée générale de jus de goyave?
puis fin de soirée à l'after 8. des femmes portent des mini T-shirts aux couleurs de l'egypte, jusque sur le dancefloor on agite les drapeaux, et on chante "au revoir côte d'ivoire". tout le monde est heureux et semble s'aimer, pour une fois. les souvenirs de la victoire française en 98 reviennent. je quitte la boîte à 4h quand les gens, femmes et hommes de tous âges s'assoient pour discuter encore de la victoire. c'est la première fois que je vois ça. entre le coiffeur et les esthéticiennes, le café pour intellectuels libérés, les gens de la place Tahrir, le personnel de l'hôtel avec qui mes copains restés à louxor ont assisté au match, la jeunesse dorée cairote de l'after 8, et bien d'autres, sûrement même les 77 milliions d'égytpiens le gouffre a semblé été franchi l'espace d'une soirée. Moubarak a dû dormir en paix la nuit dernière, heureux de l'unité de son beau peuple égyptien.

pharaons oubliés

de retour au caire après deux semaines passées à louxor. les souvenirs commencent à remplir les cases libres de ma mémoire. parmi ceux-ci, les souvenirs de mes visites de la vallée des rois, la vallée des reines et autres richesses témoins de la splendeur de la civilisation pharaonique.

l'egypte pharaonique me suggère tant de choses depuis toute petite, que la réalité s'est présentée vraiment différente de ce que j'imaginais. tout d'abord il faut affronter les masses de touristes qui ne prennent même pas le temps de regarder les parois des tombeaux qu'ils visitent. les affronter pendant la rencontre avec les merveilles qui m'entourent.
jusuq'aux grecs, les tombeaux royaux étaient objets de visites touristiques et ont été oubliés jusqu'au XVIIème siècle. après ces longs siècles d'oubli, les vestiges parlent encore, et m'ont fait vibrer.

pénetrer dans ces tombeaux et en admirer les parois a tout d'abord été déconcertant, frustrant, devant mon incapacité à comprendre cette civilisation pour moi, inconnue. les hiéroglyphes, et les décors ne restent que des dessins à mes yeux encore novices, et je me sens désemparée d'ignorance face à cette complexité. mais petit à petit je commence à comprendre, à voir des récurrences, à me sentir un peu plus familière à ce qui est représenté et je commence à déchiffrer certaines scène. puis la beauté des lieux me touche et m'émeut. je réfléchis alors sur ces dessins millénaires. j'aime penser que ces édifices somptueux ont été érigés à la gloire de pharaons, maintenant oubliés, et dont personne ne connaît l'histoire, ni l'oeuvre politique. qu'est-ce qui ammène alors ces flots de touristes et qui a suscité tant de fièvres le siècle dernier? sûrment le travail d'artistes et d'artistes inconnus. quel plaisir de penser à ces artistes qui ont travaillé dans l'anonymat à leur époque et qu'actuellement des milliers d'anonymes viennent contempler l'oeuvre? n'est-ce pas le fantasme de tout artiste que la renommée internationale et intemporelle? n'est-ce pas non plus la plus belle preuve de leur talent, puisqu'ils ont travaillé pour le passage à la vie éternelle de leur pharaon? en travaillant pour ce passage dans l'au-delà, le fruit de leur labeur a dépassé les frontières et les âges, ironie du sort, quand on essaie de réfléchir à ce qu'il nous reste des pharaons.

Saturday, February 04, 2006

pause sa'idie

depuis plus d' une semaine maintenant, je découvre un autre volet de cette culture si complexe et riche qu' est la culture égyptienne.

nous sommes arrivés vendredi dernier a louxor, pour un stage du DEAC. les deux semaines de cours qui ont précèdé le stage nous ont permis une approche de la cluture présente dans cette région: le sa'id.
certaines pratiques nous semblent barbares, notamment celle qui consiste à jeter les jeunes filles dans le Nil le jour de leur mariage si elle ne sont pas vierges, ou encore celle de la vendetta encore tres présente dans la region.

louxor est séparé en deux par le nil, la rive est, très-trop touristique, et la rive ouest, où la campagne cotoie la vallée des rois et la vallée des reines. nous logeons sur la rive occidentale, pour une meilleure immersion. c'est donc à velo que nous visitons les tombes millenaires de ces souverains oubliés, dont le souvenir perdure grace au talent d' artistes inconnus et par qui l' éternite de la vie apres la mort semble prendre corps.
à côté de ces joyaux historiques et culturels, se dessine une campagne, verte, aux champs interminables de canne a sucre, de luzerne, aux palmeraies et aux villages qui semblent être coupés de tout. ces villages ont resisté à la fuite du temps autant que les tombeaux royaux.

ce week end a été consacré à la decouverte de la ville d 'Assouan, à moins de 400 km du Soudan.
la ville et la région peuvent se pavaner d une histoire extrêmement riche.
l île de philae ou a été érigé un gigantesque temple dédié à la déesse Isis et encore vénerée par les habitants jusqu au 4eme siecle de notre ère, les villages nubiens, et le Haut Barrage ne sont que quelques temoignages de la traversée des ages qu' a connu la ville. reste le problème des "arnaques égyptiennes", pires encore que celles du Caire, les souqs pour touristes, et les frustrations d' une population confrontée à des groupes de consommateurs, pas forcement respectueux des coutumes locales et ni même conscients des richesses de la region.