avoir 20 ans au Caire

Friday, January 27, 2006

les dieux du stade

Au Caire se déroule en ce moment la Coupe d'Afrique des Nations, des matchs de foot et des matchs de foot occupent les spots publicitaires, les pages des journaux et les programmes télévisés. mardi, l'Egypte affrontait le Maroc, un match annoncé serré et important pour chacune des deux équipes, même si je n' en n' ai pas tout à fait compris les enjeux.

le match commence à 20 heures, mais il y a un autre match avant: Lybie-Côte d'Ivoire. d'après les spécialistes, la Côte d'Ivoire fait partie des favoris alors que la Lybie ne vaut pas grand chose à côté. le match commence à 17h, nous prenons le bus près du Musée à 16 heures, un bus rempli de supporters, qui se maquillent aux couleurs de l Egypte, qui préparent leurs accesoires d'encouragement, et qui font connaissance avec leur voisin.
nous arrivons au stade, c'est la première fois pour moi que non seulement je rentre dans un stade, mais en plus que je vais assister à un match de foot en entier, aujourd'hui, il y en aura deux.
personne ne veut faire la queue pour rentrer, je retrouve les embouteillage de la ville à une échelle humaine.tout le monde essaie de doubler celui qui est devant lui, on sent que les spectateurs sont excités.
tous les egyptiens soutiennent l'équipe lybienne pendant le premier match où le gagnant devra affronter l'Egypte, et la Côte d'Ivoire est une équipe trop forte face à l'équipe égyptienne, alors, les égyptiens soutiennent leur adversaire le moins fort...
pendant la mi-temps, des hommes prient, face à la Mecque, le drapeau egyptien tient lieu de tapis de prière, d'autres se maquillent, et d'autres répètent les chansons.
le moment attendu arrive, l'hymne national egyptien est entonné, et nous sommes chargés, avec une quarantaine d'autres spectateurs, de déployer le drapeau au moment de l'hymne. c'est un drapeau énorme que nous secouons, vu d'extérieur, cela doit être impressionant.
au début du match, des hommes commencent à s'énerver, parce qu'ils ne voient pas qu'ils faudrait s'assoir mais que s'ils ils sont debouts c'est à cause de ceux de devant qui eux aussi sont debouts...des discussions qui n'en finissent pas, pour finalement ne pas regarder le match.
sûrement la première demie-heure, l'ambiance est au plus haut parce qu'après, les egyptiens se rendent compte que la partie est loin d être gagnée. et ce, jusqu'au 5 dernières minutes, où tous les espoirs s'envolent. tout le monde sort déçu de ce match au résultat plus que déconcertant: 0-0
nous reprenons un bus, fatigués, et deux hommes commencent à se disputer, puis en vient un autre qui se mêle de l'histoire, puis deux, trois, et tout le bus crie, sans connaître l'origine du problème.
tous les drapeaux égyptiens sont rangés, les têtes maquillés déçues, et chacun rentre chez soi.

Monday, January 23, 2006

canons de beauté

journal El Goumhouriyya ( La République) de ce matin:
une jeune fille de 17 ans a gagné le titre de Awwal malikat el jamal el mutahajibba, en français: la première reine de beauté voilée. en concurrence avec 56 autres femmes d'âges différents, celle-ci s'est distinguée par sa beauté, sous un voile. la compétition s'est déroulée dans un pays que le journal nomme le Tataristan-une des républiques russes. le pays m'est inconnu, et l'information, plus que déconcertante est vraie. cette jeune gagnante va devoir alors représenter la femme voilée au service de sa culture, de son histoire et de sa religion toute en beauté. reste à savoir maitenant si une des étapes de la sélection a été faite en bikini...

Sunday, January 22, 2006

Damas























Damas

7 janvier, dernière étape syrienne: Damas.

après les visites des différents souqs, souq Sarouja, souq el Hamidiyye, nous passons notre première soirée au restaurant Bayt Jabri. situé dans une petite ruelle aux alentours de l mosquée des Omeyyades, l'endroit est impressionant, il s'agit d'une ancienne demeure damscène datant de 1737 et nous mangeons dans la vaste cour sous les vignes. des hommes jouent au tric-trac, un groupe de musiciens interprètent de vieilles chansons arabes que papa me chantaient quand j'étais petite, des familles sont là pour fêter une occasion particulière ou pas.
le quartier chrétien, Bab Touma, par la paisibilité qui y règne, ses petites ruelles biscornues, ses boutiques d'artisanat, me fait penser à Alep. des souffleurs de verre travaillent dans leur atelier, malheureusement le four n'est pas allumé.

et puis il y la mosquée des Omeyyades. celle qui depuis le début de mes études d'arabe évoque des images, des anecdotes auxquelles se confronte l'Histoire. le site sur lequel elle est construite date du IXè siècle avant notre ère et accueille à cette époque un temple voué au dieu araméen de la pluie et de la fertilité, Hadad et à son épouse Artagatis. le lieu, repris par les Romains, devient par la suite un temple destiné à Juptier. au début de l'ère byzantine, le temple est transformé en une église dédiée à Jean-Baptiste, le christiannisme est alors religion officielle. une fois Damas prise par les troupes arabo-musulmanes après la bataille de Yarmouk en 636, chrétiens et musulmans partagent le lieu de culte. en 661, sous la dynastie des Omeyyades, Damas devient la capitale de l'empire arabo-islamique. il faudra 10 ans pour que l'eglise devienne définitivement une mosquée, après des travaux considérables et d'énormes dépenses, la mosquée est achevée en 715, et devient à ce moment, le plus grand édifice musulman du monde. on raconte que la constrcution de la mosquée a coûté 7 années de revenus à l'Etat, que 400 coffres contenant chacun 14 000 dinars auraient nécessaires à payer les travaux, et que les factures, portées par 18 chameaux auraient été brûlées par Walid Ier sans les regarder en déclarant : "Pour Dieu, on ne compte pas".
une fois l'entrée franchie, la cour est éblouissante. le sol blanc et brillant, les mosqaïques aux murs dorées nous laissent imaginer l'éclat de l'édifice au moment de sa construction.
il est déconcertant de voir comme des familles peuvent passer leur temps dans la salle de prière, se prendre en photo devant les reliques de Jean-Baptiste, et des enfants jouer à se courir après dans la cour, autour de la fontaine aux ablutions, tandis que les fidèles vont et viennent. l'endroit vit, sans être austère malgrè sa grandeur, sa splendeur et son importance religieuse ( 4ème lieu saint après La Mecque, Médine et Jérusalem).

nous visitons aussi le Palais Azem, érigé par le gouverneur ottoman de Damas Assad Pacha el Azmen au milieu du XVIIIè siècle. une fois à l'intérieur, un autre monde s'ouvre à nous.les pièces élégamment décorées donnent sur des cours calmes et ombragées d'où l'on perçoit le murmure des fontaines. salon de musique, salle de réception, salle du mariage, salle du pélerinage, salle des armes, salles des costumes traditionnels, toutes rivalisent par la finesse des décorations, la richesse des boiseries et le luxe des objets qui y sont exposés. à ce spièces s'ajoutent un vaste hammam ainsi qu'un diwan. la sérénité du lieu me transporte le temps quelques minutes dans un autre univers, lointain.

nous nous rendons à Maaloula, une village non loin de Damas, connu pour être un des rares lieux de Syrie où la langue de Christ, l'araméen est encore parlée. le visage est perché dans la montagne et la vue est splendide. ce haut de la chrétienté est aussi un endroit empli de sérénité.

sur les hauteurs de Damas et dominant la ville, se trouve le Mont Qassioun, appartenant à la chaîne de l'Anti Liban. selon une des nombreuses légendes, Abraham y serait né, pour d'autres, ce serait du haut ce mont que le prophète Mohammad en regardant Damas, n'aurait pas osé entrer dans cette belle oasis de peur d' être détournée de son chemin vers le paradis, avec ses jardins et ses ruisseaux et présentant tous les attraits des délices terrestres. le coucher de soleil, puis la ville illuminée nous donnent une vue d'ensemble magnifique. la ville ressemble à une petite forêt touffue de minarets fluorescents qui brillent dans l'obscurité de la nuit.

Damas restera alors un beau souvenir, et une impression de ne pas y avoir passé assez de temps, celui qui est néeccesaire pour s'imprégner du passé riche et complexe et de l'ambiance actuelle de la ville. un de mes projets se dessine de plus en plus: une année à Damas pour apprendre l'arabe pourquoi pas?

Monday, January 16, 2006

Lattaquié


05 janvier, départ d'Alep pour la Marseille syrienne: Lattaquié.
dans le taxi, à la gare, dans les boutiques aux alentours, la même station de radio est écoutée et la ville semble résonner aux mélodies de Fairouz. nous traversons de paysages magnifiques et variés durant le trajet en train entre Alep et Lattaquié.
Lattaquié est une ville étonnante. les jeunes filles marchent entre copines, simplement pour se promener et rester entre amis. je suis tellement habituée avec les filles et les femmes marcher pour aller faire des courses, aller et rentrer à l'université ou au travail, mais les voir marcher sans but, riant entre elles m'interpelle. les femmes ne sont non plus pas voilées. le passage dans la ville est une bouffée d'air pour l'esprit et pour les poumons.
les promenades sur la corniche, la visite d'Ougarit où la présence humaine remonte au VIIème millénaire avant notre ère, le vent iodé, le château de Saladdin dans les montagnes et les forêts odorantes de pins me font oublier le caire et son incessant vacarme, le dépaysement est total.



un pâtissier à alep

une pensée spéciale pour cet homme, un parmi les nombreuses personnes que l'on croise durant un voyage.
sa pâtisserie, ses montagnes de gâteaux brillants de miel et de sucre, son petit garçon qui nous a servi deux thés en se mordant la lèvre de concentration, les cadres accrochés au mur témoins d'une tradition de père en fils, sa gentillesse quand il nous a offert des gâteaux, l'odeur des pistaches, des cacahuètes, du sucre, le lieu, ont rendu un petit déjeuner banal en un moment unique passé à savourer les délices autant que la douceur et la tranquillité de l'instant.

alep

chacun des moucharabiyyé, les ruelles des souqs, les mosquées, le quartier chrétien, le musée archéologique, l'incroyable citadelle, le luxe désuet de l'hotêl Le Baron, tous les éléments qui rendent la ville merveilleuse, témoignent de sa riche et complexe histoire. cependant, rien ne m'explique l'ambiance si particulière qui y règne. cette douceur de vivre mêlée à une excitation toute particulière qui font d' alep, une ville résolument arabe.

Sunday, January 15, 2006

alep






alep



alep restera l'un de mes plus beaux souvenirs. deuxième ville de syrie, alep dispute à damas la place de plus ancienne cité du monde encore habitée. sa longue histoire se lit sur les murs de la ville ainsi que les nombreuses influences qu'elle a subies. ville syrienne, pleine de contraste et dotée d'une forte personnalité, elle est une des combinaisons possibles qui constituent une belle ville arabe.
une journée à se perdre dans les souqs et les khans de la ville nous a plongés au coeur même de la ville arabe, nous a permis de s'imprégner de l'athmosphère de la ville, de sentir son histoire complexe, et de sentir les douces odeurs de la vie.
les souqs, dédale de ruelles médiévales sont couverts de voutes en pierres, illuminés par des lanternes. des échoppes minuscules et nombreuses présentent un étalage déconcertant d'objets, de produits traditionnels. chaque échopppe est un délice: les couleurs des bonbons et des paniers d'épices, les odeurs des savons, les voix des vendeurs qui vantent les mérites de leur marchandise, les saveurs que l'on s'imagine en contemplant l'étalage, fondus dans un monde grouillant et bruyant.

amman-damas

2 janvier, départ pour damas.
nous n'avons pas de visa syrien sur le passeport, et la frontière me fait peur. discuter en arabe avec un fonctionnaire syrien pour pouvoir rentrer m' inquiète.
nous prenons un taxi à amman, le chauffeur ne prend même pas la peine de vérifier si nos passeports sont en règle. nous ne lui en disons rien.
plus la frontière approche, plus je suis anxieuse.
nous arrivons à la frontière jordanienne, remplissons les formalités pour quitter le territoire jordanien, et atteindre le poste syrien. à ce moment, le chauffeur s'aperçoit de la faille, s'énerve avec le passager assis à sa gauche. je lui demande s'il y a une problème. il me répond que non, in chah allah.
arrivée au bureau, un fonctionnaire me demande nos passeports que je présente. il regarde, à la recherche du visa syrien, et me demande où est passé ce visa. étonnée, je lui dit que je comptais le faire à la frontière. ce n 'est pas possible? j'ai pourtant fait ainsi il y a quelques années...pendant ce temps, le chauffeur offre ces sourires les plus beaux aux fonctionnaires, salue tout le monde, présente ces voeux tandis que je continue à faire la touriste mal informée.
le fonctionnaire me demande ensuite mon nom. Najla Nakhlé. il s'étonne: " de la famille Nakhlé???". bien sûr.
je lui explique que mon père est d'origine libanaise, ma mère est française, et que j'ai toujours vécu en france. la durée de notre séjour en syrie lui paraît louche, 10 jours, c'est trop. les passeports tournés, retournés, pesés et soupesés, le fonctionnaire annonce son verdict: il m'accorde le visa, "parce que je suis une arabe", mais celui de mathieu est refusé. après de nouvelles discussions il s'absente dans un bureau, et revient pour nous donner l'autorisation de payer chacun 28 dollars et entrer en syrie.
je remercie le chauffeur, et nous reprenons la route pour damas, nous arrivons après 4 heures de trajet.
arrivés à damas, nous allons à la gare...prendre un bus pour alep. 4 heures de bus avec escale à homs nous ammènent enfin à alep. après plusieurs essais vains pour trouver une chambre d'hôtel, nous trouvons, contents de nous reposer et de cesser de manger des kilomètres pendant quelques jours...

jerash

1er janvier, après une nuit plus ou moins réparatrice, nous partons vister les ruines de Jerash, à une cinquantaine de kilomètres au nord-ouest d'Amman.
les ruines romaines sous le soleil qui se couche, les couleurs douces et pâles du ciel sur la pierre me plaisent énormément. le site est en montagne, la route pour y accéder me rappelle les paysages libanais. il est bon de retrouver le calme et la paisibilité après ces trois mois égyptiens.

le caire-amman

nous sommes donc partis, mathieu et moi, le 30 janvier du Caire. le bus pour Nuweiba, port égyptien sur la mer rouge est prévu à 22hOO, nous quittons le Caire à minuit...le voyage est difficile, il fait froid, le bus tombe en panne trois fois en plein désert et en pleine nuit. la première fois, seuls les hommes descendent voir ce qui se passe, histoire de faire peu à la panne et de rassurer le reste des passagers. la deuxième, il faut que tout le monde descende pour remonter à peine quelques minutes plus tard. enfin, le chauffeur descend, et, sous nos regards étonnés, il met la main sous la roue, et juge que l'on peu repartir, en toute confiance.
il est 7hOO quand nous arrivons à nuweiba, fatigués. le soleil commence à se lever sur la mer rouge. une sieste au bord de la mer nous redonne quelques forces, et nous embarquons à 11h00, départ prévu une heure plus tard.
15h30, le bateau quitte le port, après 8 heures d'attente.
fatiguée, je profite de la traversée pour me "reposer" un peu, je m'allonge sur une banquette inconfortable pour dormir. je suis réveillée par des voix très proches de moi. je m'étais en fait installée à la place d'une famille: une femme voilée assise en face, une petite fille dort à côté de moi, une autre sur les genoux de sa maman, et le monsieur ne semble pas gêné par ma présence. je me confonds en excuses, mais la dame me demande de rester, elle insiste tandis que l'homme se lève pour me faire un coussin avec une couverture et me couvrir avec une autre.
nous sommes le 31 décembre, je me sens si loin de tous les précédents "31 décembre" que j'ai passés jusqu' à maintenant.
loin de ma famille, de mes amis, de ces fêtes que l'on prépare une semaine en avance, des ces journées après noël à la maison avec un mal de ventre causé par les excès alimentaires. je me sens seule.
le sommeil que j'arrive à trouver me redonne du courage, et au moment où je me réveille nous arrivons à Aqaba, il est 19h30. le retard que nous n'avions pas prévu nous fait renoncer à notre plan de prendre la route directement pour Amman.
sortis de la douane, les formalités administratives accomplies, nous trouvons un bus qui nous emmène à Amman. je passerai New Year's Eve dans un bus sale et vieux entre Aqaba et Amman, seule fille du bus entourée de vieux bédouins qui n'ont que faire de la nouvelle année qui commence. un beau souvenir, et une belle soirée.

retour au caire

de retour au caire, après des kilomètres parcourus en bateau, en bus et en taxi, jusqu'à la frontière syro-turque. notre fièvre voyageuse ne nous a quand même pas amenés à fouler le sol turc, faute de temps et pas d'envie.
je rentre dépaysée et heureuse de toutes ces belles choses que j'ai eu la chance de voir, en si peu de temps.

les cours ont repris ce matin, c'est aussi bon de reprendre les habitudes cairotes, et de revoir les visages qui sont devenus mon nouvel univers.